Après l'Empire (Emmanuel Todd)

        Je voudrais citer Emmanuel Todd dans son livre « Après l'Empire » :

 

 

        Si nous sortons d'un modèle général et abstrait utilisant les mots de   capitalisme, de profit, de riches, de Bourse, etc. et réinsérons ces notions dans la réalité du monde, nous devons dire, tout simplement, qu'une partie importante des profits du monde court vers le système boursier américain. Je n'aurais pas la prétention de vouloir seul reconstituer la totalité des mécanismes de redistribution aux États-Unis de ce revenu en provenance de l'étranger. Trop de leurres financiers et idéologiques font du système un jeu de miroirs déformants : de l'emploi d'une domesticité innombrable d'avocats et de comptables par les possesseurs du capital à l'endettement des ménages moyens et aux purges successives subies par Wall Street. Sans oublier les baisses successives du loyer de l'argent, avec un taux d'intérêt réel zéro en ligne de mire, qui équivalent, dans une économie de spéculation, à des distributions gratuites de monnaie. Mais si nous admettons que l'économie américaine est, dans sa réalité physique, faiblement productive, ainsi qu'en témoigne l'importation massive et croissante de biens de consommation, nous devons considérer que la capitalisation boursière est une masse fictive et que l'argent dirigé vers les États-Unis entre, littéralement, dans un mirage.



            

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          Par des voies mystérieuses, le mouvement d'argent conçu par des privilégiés de la périphérie [de l'Empire  américain] comme un investissement en capital se transforme pour les Américains en signes monétaires servant à la consommation courante de biens achetés à travers le monde. L'investissement en capital devra donc, d'une façon ou d'une autre, être vaporisé. La  science économique devrait spéculer, analyser, prévoir : la chute des indicateurs boursiers, la disparition d'Enron, l'implosion du cabinet d'audit Andersen fournissent des pistes et des hypothèses. Chaque faillite américaine se traduit pour les banques européennes ou japonaises par des volatilisations d'actifs. Et puis nous savons d'expérience en France que, du scandale du Crédit Lyonnais à la mégalomanie américanophile de Jean-Marie Messier, un investissement massif aux États-Unis est comme l'annonce d'une catastrophe imminente. Nous ne savons pas encore comment, et à quel rythme, les investisseurs européens, japonais et autres seront plumés, mais ils le seront. le plus vraisemblable est une panique boursière d'une ampleur jamais vue suivie d'un effondrement du dollar, enchaînement qui aurait pour effet de mettre un terme au statut économique impérial des États-Unis. Nous ne savons pas encore si la baisse du dollar qui s'est amorcée au début d'avril 2002, à la suite de l'affaire Enron-Andersen, n'est qu'un aléa du système ou le début de sa fin. L'implosion du mécanisme sera aussi surprenante que l'a été son émergence.

 

   

 

            Dans la mesure où les revenus des pauvres, des classes moyennes et des privilégiés ont  progressés de 1995 à 2000 à peu près au même rythme aux États-Unis, le moraliste peut trouver un certain réconfort dans la vision terminale d'une plèbe américaine accaparant une partie des profits du monde entier, européens notamment. C'est un retour fondamentaliste à Jesse James : on vole aux riches pour donner aux pauvres – à ses pauvres. Un tel mécanisme ne révèle t'il pas la puissance impériale des États-Unis, semblable à celle de Rome ?

 

 

 

            Mais l'Amérique n'a pas la puissance militaire de Rome. Son pouvoir sur le monde ne peut se passer de l'accord des classes dirigeantes tributaires de la périphérie. Au-delà d'un certain taux de prélèvement, et d'un certain niveau d'insécurité financière, l'adhésion à l'empire n'est peut-être plus pour ces dernières une option raisonnable.

 

   

     Pour dire autrement qu'Emmanuel Todd, je dirais que le capitalisme à l'américaine est une idéologie qui a ses victimes de la mode. Il n'est pas la réalité, ni même une réalité inéluctable. Il reflète ce que voudrait nous imposer une minorité : celle qui ne veut croire qu'à l'attrait et à la force des flux financiers. A qui profite cette croyance ?

 

     L'argent a bien sûr son intérêt propre. Mais aux cimes où l'ont placés les américains, il suffira de peu pour que tout l'édifice s'écroule. Il suffira juste que le reste du monde cesse d'y croire.

 

     L'Amérique est toute entière constituée et consacrée à ces flux financiers. Les âmes et les corps y brûlent fiévreusement, au nom des grands prêtres et de leur temple de Wall Street. Tout l'édifice ne fait que reposer sur un principe de confiance.

     Le moindre dollar est béni : dessus on peut lire « In God We Trust ». La croyance dans l'argent est le nœud de l'existence de l'Amérique.

 

     Est-ce qu'il serait vraiment surprenant que l'empire américain implose, comme a déjà implosé l'empire soviétique : sans faire de mort (pour changer), brusquement, terrassé d'un coup, d'un accès de manque de foi ?

 

     Est-ce que cela nous étonnerait vraiment ?

 

 

 

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11/05/2007
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